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25 octobre 2016 2 25 /10 /octobre /2016 10:59
Paris. Quai de la Tournelle. 25 Octobre 2012. © Jean-Louis Crimon

Paris. Quai de la Tournelle. 25 Octobre 2012. © Jean-Louis Crimon

Cher grand nostalgique,

 

Une photo, une simple photo et tout bascule. Tu te retrouves quatre ans plus tôt. Quatre ans pile. 25 Octobre 2012. Tu es sur le quai. Quai de la Tournelle. Bouquiniste parmi les bouquinistes. Chaque jour, tu rédiges ta chronique des nouvelles du bout du quai. Petits faits anodins pour ton voisin, grands moments de vie et de littérature -mais oui- pour toi. Tiens, relis-toi cette séquence pas dégueu. Qui prouve que dans le milieu, on n'est pas des gueux !

 

--------------------------------------------Journal du Bouquiniste------------------------------------------------------

 

Beau bleu de ciel. Beau bleu de ciel bleu. Beau bleu de ciel bleu dans les yeux. Bleus. Des feuilles d'or sur les branches des arbres. Belle journée d'automne. Demain, l'hiver frappe à la porte. Selon le prévisionniste météo, dix degrés de moins sur le paletot. Surtout pour ceux qui se lèvent tôt. De 14 degrés, on passerait à 4 petits degrés. Si c'est vraiment vrai, a dit mon voisin, de quatorze à quatre, pour aller sur le quai, on va pas se battre.

Une dernière fois, ou presque, jolie fresque, de belles passantes jouent les élégantes. Certaines offrent leurs épaules au soleil qui les frôle. Encore un peu d'été dans l'automne.

Deux gamins en skate squattent d'un coup le trottoir. Deux turbulents. A ne pas avoir la langue dans la poche. L'un des deux stoppe pile face à l'endroit des Poches.

- Liliane est au Lycée ? vous l'avez ? 

- Liliane est au lycée ?

- Oui, c'est écrit par un Grec !

- S'rait pas plutôt... L'Iliade et l'Odyssée ?

- Ah, ouais, c'est p't'êt' ça !

- Vérifie le titre, mon gars, et reviens me voir quand tu seras sûr de toi ! Je te le mets de côté jusqu'à lundi !

 

Le métier de bouquiniste est parfois homérique. Homérique. A la fois héroïque et comique.

 

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

 

Jolie chronique, non ? Dire que ton Editeur Le Castor Astral a renoncé à publier un recueil d'une centaine des meilleures. Sur 500, c'était jouable, non ?

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24 octobre 2016 1 24 /10 /octobre /2016 10:03
Amiens. 24 Octobre 2016. © Jean-Louis Crimon

Amiens. 24 Octobre 2016. © Jean-Louis Crimon

Cher citadin matinal,

 

Toi, tu le sais, tu le tiens d'un balayeur, matinal comme toi. "La place du balai", c'est l'espace que doit laisser chaque automobiliste, entre sa voiture et la bordure de trottoir. La place du balai, pour que le balayeur puisse faire son travail. Puisse bien faire son travail. Que l'on se gare en épi ou pas.

Manifestement, ça ne s'enseigne pas dans les Ecoles de conduite automobile, pas davantage chez les élus municipaux. Pas de pot, mis à part les pots d'échappement. Le balayeur des rues en est pour sa quotidienne déconvenue.

Tous les usagers de la ville devraient recevoir une formation au balayage et aux contraintes du balayeur. Pourrait commencer par le nom et la composition de toutes les sortes et de tous les types de balais.

Le balai sert au nettoyage, ménager ou urbain. C'est un outil composé d'un long manche auquel est fixé un faisceau de brindilles, de feuilles ou plus généralement une brosse de crin, de soies, de nylon. Il y a ainsi une multitude balais qu'on peut définir par leur composition.

Balai de bouleau, de bruyère, de chiendent, de crin, de genêt, de jonc, de paille, de palmier; balai automatique, balai mécanique. Balai à laver ou balai-brosse, balai à vaisselle, à franges. Les récalcitrants feraient connaissance avec l'armoire ou le placard aux balais.
 
Drôle, non, ton idée ? Tu ne serais pas en train de candidater à une place de formateur ?
 
 
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23 octobre 2016 7 23 /10 /octobre /2016 22:31
Amiens. Octobre 2016. © Jean-Louis Crimon

Amiens. Octobre 2016. © Jean-Louis Crimon

Cher villageois à la ville,

 

Coup d'œil ou clin d'œil ? t'en fous, toi, tu vois, c'est tout. Tu vois ce que les autres ne voient pas et ça t'amuse. Tu vis la même vie, tu vis dans la même ville, et tu ne vois pas la même ville. Tu ne vois pas les mêmes choses. Tu trouves de la beauté là où les autres ne voient que de la banalité. Tu n'en tires aucune gloire particulière, mais tu écris à la manière d'un architecte du regard. A moins que ce ne soit l'architecte que tu n'as pas osé être qui s'exprime à travers tes yeux. L'archi/texture, ton vrai métier.

Tu aimes tellement ces jeux d'images qui se croisent dans une rue familière soudain inattendue.  

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22 octobre 2016 6 22 /10 /octobre /2016 23:35
Abbeville. Octobre 1978. © Jean-Louis Crimon

Abbeville. Octobre 1978. © Jean-Louis Crimon

Cher épistolier amoureux,

 

Cette fois, tu es battu. A plates coutures. Record absolu de pleins et déliés. Mille deux cent dix-huit lettres. 1218 lettres écrites entre octobre 1962 et septembre 1995. Tu imagines... 33 ans de lettres d'amour. 1218 lettres. Plus fort que les 110 propositions. Plus fort qu'un Programme commun de gouvernement.

Etrange et malicieuse postérité qui salue aujourd'hui l'œuvre littéraire cachée d'un homme politique qui, sur ses affiches, en public, avait repris le cri de Rimbaud: "Changer la vie".

Tu écrirais bien à cet homme là qui a été le Président de deux septennats et qui nous revient d'entre les morts pour être reconnu aujourd'hui comme l'auteur d'une véritable œuvre littéraire. Un juste retour des choses, au fond, pour celui qui ne cachait pas qu'il aurait aimé être... Ecrivain.

Mille deux cent dix-huit lettres, comme le superbe post-scriptum d'une vie qu'on croyait tout entière consacrée à la politique. Un post-scriptum, P.-S., qui vaut bien l'autre PS.

Oui, tu écrirais bien à cet homme qui affirmait croire, non pas forcément en Dieu, mais aux forces de l'esprit.

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21 octobre 2016 5 21 /10 /octobre /2016 14:47
Amiens. Soir de pluie. 14 Oct. 16. © Jean-Louis Crimon

Amiens. Soir de pluie. 14 Oct. 16. © Jean-Louis Crimon

Cher nyctalope,

 

Tu adores ça. Peindre avec la lumière. Ecrire avec la lumière. Avec les yeux du hasard aussi. La chance parfois. Ecrire sans les mots. Calligraphier la lumière. Capter la lumière. Chasser les signes. Pourchasser les formes. Jeu de piste magique. Pêche malicieuse, minutieuse, miraculeuse. Deux ombres dans la nuit. Deux ombres qui se font face. La nuit n'en aura trace. Toi, oui. Photo de deux fantômes. Tu penses à Verlaine et aux deux premiers vers de son Colloque sentimental :

 

Dans le vieux parc solitaire et glacé
Deux formes ont tout à l'heure passé.

 

Instant noctambule. Le temps sort de sa bulle. Nocturne conciliabule.

Le hasard est un être lumineux.

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20 octobre 2016 4 20 /10 /octobre /2016 00:19
Amiens. Librairie du Labyrinthe. 20 Oct. 16. © Jean-Louis Crimon

Amiens. Librairie du Labyrinthe. 20 Oct. 16. © Jean-Louis Crimon

Cher passager clandestin,

 

Au fond, tu es chanceux, vraiment chanceux. Tu auras eu de la chance comme être humain. Même si dans cette vie tu te sens en permanence passager clandestin. Mais il y a "destin" dans "clandestin". Ce n'est pas pour te déplaire. Destin du clan. Clan du destin. Tu t'en fous. Tu as dû te tromper d'époque. Reste que dans cette époque, tu es chanceux, terriblement chanceux. Dans ta vie de mortel, tu en as rencontré des gens. Des gens fascinants. Des personnes. Des personnages. Des personnalités. Des anonymes ou des célébrités. Ta dernière rencontre vaut son pesant d'humanité. Ce Velibor Čolić est vraiment un être extraordinaire. Il écrit comme il parle. Il parle comme un écrivain. Il a le sens de la formule, ou  plutôt il a la formule du sens. Il saisit une image, il te la tourne, te la retourne, et de l'image, il te sort une idée. Il est comme ça, Velibor. Son regard, ses paroles, ses mots, c'est de l'or. D'avoir croisé sa route, sans aucun doute, ça te change une vie, ça te change ta vie.

Tu n'arrêtes pas depuis deux jours de relire à haute voix des passages entiers de son Manuel d'exil. Un texte fort et dense, tout en finesse et en rudesse. Ecrit au cutter. Tout en ironie féroce et tendre. Velibor Čolić possède ce talent inouï de nous faire rire quand on a envie de pleurer et de nous rendre paisiblement serein quand on a des raisons d'avoir la rage au ventre.

"Je suis assis sur ce banc public à Rennes. Il pleut de l'eau tiède et bénite sur la ville. Je réalise peu à peu que je suis le réfugié. L'homme sans papiers et sans visage, sans présent et sans avenir. L'homme au pas lourd et au corps brisé, la fleur du mal, aussi éthéré et dispersé que du pollen. Je n'ai plus de nom, je ne suis plus ni grand, ni petit,je ne suis plus fils ou frère. Je suis un chien mouillé d'oubli, dans une longue nuit sans aube, une petite cicatrice sur le visage du monde.”

 

Librairie du Labyrinthe, ce jeudi soir d'Octobre, tu n'es pas seul à avoir comme de l'eau dans les yeux et ce n'est pas à cause de la pluie du dehors.

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19 octobre 2016 3 19 /10 /octobre /2016 23:28
Amiens. 14 Octobre 2016. © Jean-Louis Crimon

Amiens. 14 Octobre 2016. © Jean-Louis Crimon

 

Cher rêveur impénitent,

 

C'est une journée grise qui n'en finit pas. Tu traverses la ville à grands pas. Soudain, tu trébuches. Bordure de trottoir criminelle. Belle gamelle. Tu te retrouves en enfance. D'un coup, d'un seul, tes 10 ans te reviennent dans la gueule. Tu descends à pied de Saint-Acheul jusqu'à la Gare routière. Prendre l'autocar. Celui de moins le quart. Le manteau de nuages n'est annonciateur que de mauvais présages. Ton carnet de notes n'est pas très bon. Le Petit séminaire, au fond, n'est pas pour toi. Tu rêves beaucoup trop pour être à l'aise dans leur chemin de croix. A la question: pensez-vous avoir la vocation ? tu sais bien que tu as répondu NON, et qu'il ne le fallait pas. Tu entends déjà ta mère et ta grand tante te dire: qu'est-ce qu'on va faire de toi ?

Tu as oublié la sempiternelle ritournelle: Le fils aîné doit être donné à Dieu. Tu n'en crois rien, Dieu, s'il existe, n'a pas besoin de toi. Des curés, y'en a déjà trop comme ça. Toi, dans ta tête, même dans la cour trop petite du Minimat, tu fais le Tour du monde. La cour de récré, trop peu pour toi. Tu t'évades dès que tu peux. Toi, tu es déjà en route pour aller à la rencontre de... L'Oiseau Bleu  . 

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18 octobre 2016 2 18 /10 /octobre /2016 10:39
Helsingör. Danemark. Öresundståg. Mars 2016. © Jean-Louis Crimon

Helsingör. Danemark. Öresundståg. Mars 2016. © Jean-Louis Crimon

Cher auditeur désemparé,

 

Tu le sais bien, l'époque est terriblement dérisoire et cruelle. Mais à ce point d'écœurement, non, tu ne l'imaginais pas. Tu ne pensais pas ça possible. Avec autant de légèreté, pour ne pas dire de grossièreté, le flashman du petit matin annonce mécaniquement: "Grosse galère pour 12.000 voyageurs du TGV". Titre banal, efficace, pour le présentateur des infos qui se doit d'être sans état d'âme et qui précise: Les voyageurs à destination de Paris, Lyon, Marseille et Montpellier sont arrivés avec quatre heures de retard.

Sans s'étendre sur la cause, la voix de la radio explique: un TGV a percuté une personne dans l'Yonne, lundi, vers 17 heures, ce qui a provoqué des retards pour une vingtaine de rames, Paris-province et province-Paris.

Des voyageurs TGV ont perdu 4 heures. Un désespéré a perdu la vie. Personne n'a dit "Grosse galère pour l'être humain qui s'est suicidé en marchant froidement face à un TGV. Quatre heures de retard pour 12.000 voyageurs, ça, c'est une info, mais un être humain, une personne, un être vivant qui décide de mourir face à un TGV, un suicidé à grande vitesse, non, ça ne mérite pas un mot, ça ne se fait pas, ça ne se dit pas. On se voile la face. On efface. La SNCF a sa superbe formule pour parler de la mort de quelqu'un: Accident de personne ! Comme si la personne n'était... personne.

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17 octobre 2016 1 17 /10 /octobre /2016 14:52
Amiens. Octobre 2016. © Jean-Louis Crimon

Amiens. Octobre 2016. © Jean-Louis Crimon

Cher épistolier morose,

 

Cette fois, c'est pas peut-être, tu l'as trouvée, ta Boîte aux lettres ! Sur le Boulevard. Le Boulevard Maignan Larivière. Celui qui mène à la rivière. Bon, pas vraiment, arrête la frime, c'est juste pour la rime. La rivière n'est pas si proche. Doit y avoir anguille sous roche. En plus, ce soir, c'est fou ce qu'il flotte. Va déborder, la rivière. Tombe des cordes. En moins de deux, sans pébroc, te voilà vieux chien mouillé. Normal, puisque... It's raining cats and dogs, comme disent les Britishs. Plus élégant que "vache qui pisse". Dans le registre, la langue française est plus riche: il pleut à torrent, il pleut à verse, il pleut à seaux ou encore il tombe des hallebardes.

Ta ville, tu le sais bien, c'est une ville qui a la pluie facile. Souvent, ça passe, d'un coup, d'un seul, la pluie s'efface. Te laissant un ciel tout blanc pour linceul. Mélancolie du soir, pas sûr que ça rime avec espoir.

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16 octobre 2016 7 16 /10 /octobre /2016 23:44
Margny-lès-Compiègne. Médiathèque Jean Moulin.16 Oct.16. © Jean-Louis Crimon

Margny-lès-Compiègne. Médiathèque Jean Moulin.16 Oct.16. © Jean-Louis Crimon

Cher romancier romantique,

 

Tu te demandes toujours à quoi ça tient ? Un regard, un sourire, un ou deux mots échangés ? La lectrice potentielle passe et repasse devant tes deux mètres carrés de nappe blanche. Jette un œil discret aux ouvrages, zoome du regard les titres de tes livres. Au Salon des Voyageurs en partance, il y a du beau monde, mais toi, tu rêves de l'embarquer pour la lecture d'un de tes romans. Elle s'arrête, hésite, se décide, t'empoigne, t'ouvre, te feuillette, soudain te referme et te pose. Puis te reprend, te parcourt. Un haut de page, un début de chapitre, quatrième de couverture. A quoi ça tient la littérature ! Un rien, un mot, une ligne, un paragraphe, qui font écho. 

Soudain, elle lâche: c'est chouette. Sûr, c'est gagné ! De lectrice potentielle, elle se métamorphose en lectrice réelle. Elle... t'achète.

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