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7 décembre 2024 6 07 /12 /décembre /2024 08:57
Paris. Notre-Dame. Une Apparition. Dimanche 16 Sept. 2012. © Jean-Louis Crimon

Paris. Notre-Dame. Une Apparition. Dimanche 16 Sept. 2012. © Jean-Louis Crimon

Le dimanche n'a pas été grandiose. Trois euros pour un Poche. Le Pavillon des Cancéreux. Soljenitsyne. Trois euros. Tout juste de quoi me rembourser mes deux tickets de métro. Beaucoup de promeneurs, sur le quai, pour le dernier dimanche d'été. Avec déjà, dans le ciel, un paquet d'accents d'automne.

Une étudiante en quatrième année de Lettres, à la Sorbonne, cherchait Pauvre Belgique de Charles Baudelaire. Pour son mémoire. Un texte en prose en forme de pamphlet où l'auteur des Fleurs du Mal ne dit pas que du bien du pays d'Outre-Quiévrain. Je ne l'avais pas. Lui ai conseillé de demander à mon voisin Julien. Ou à ma voisine Marie-Hélène. Ou, vraiment, si c'est urgent, d'aller voir sur Price Minister. Ou chez Gibert. Texte méconnu de Baudelaire, quasi introuvable, pendant longtemps. Sinon dans La Pléiade. Pamphlet inachevé, republié, l'an dernier, chez Ramsay, avec Les Lettres de Belgique à sa mère.

Le 24 avril 1864, criblé de dettes, Baudelaire décide de fuir ses créanciers français. Trouve refuge dans un hôtel minable de Bruxelles. Pense gagner un peu d'argent en faisant des conférences. Mais son réel talent de critique d'art ne déplace pas les foules. Charles écrit des lettres terribles à sa mère, la veuve Aupick. Charles parle d'une Belgique insupportable, caricature de la France bourgeoise qu'il exècre. Son texte Pauvre Belgique restera inachevé. A Bruxelles, preuve de la profondeur de son désespoir, il s'invente son épitaphe en un mot : Enfin !

Plus tard, s'arrête longuement devant mes boîtes, une petite dame aux cheveux tout blancs. Elle s'empare d'un ouvrage au titre éloquent : Au risque de l'Esprit. Me demande avec un petit sourire en coin et un air narquois : ça parle de quoi ? Moi, faussement énigmatique: Madame, la réponse se trouve dans la majuscule du E du mot Esprit !

Elle me lance : A dimanche prochain ! Ce n'est pas un Adieu. Juste un Au-Revoir ! Elle ajoute, en partant, à petits pas pressés : Mettez-le moi de côté, parce que, là, je file, je vais être en retard à la messe.

Plus tard, encore, sur le parvis de Notre-Dame, étrange spectacle. Apparition soudaine. Un Christ géant pour attirer le regard des gens. Photo. Forcément. Cadrage impossible. Trop de monde : ça grouille de partout. Je risque. Une image. Même pas deux.

En bas, à droite de l'image, symétrique parfaite, la vie est bien faite, message personnel du Christ tout blanc à une Marie-Madeleine éventuelle, petit mot d'amour d'une dimension assez peu spirituelle : Trésor.

 

© Jean-Louis Crimon

 

(Chroniques du Bouquiniste, 16 septembre 2012).

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6 décembre 2024 5 06 /12 /décembre /2024 08:57
Amiens. Rue des Cordeliers. 5 Déc. 2024. © Jean-Louis Crimon

Amiens. Rue des Cordeliers. 5 Déc. 2024. © Jean-Louis Crimon

© Jean-Louis Crimon

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5 décembre 2024 4 05 /12 /décembre /2024 08:57
Paris. Avenue Mozart. Antiquités 88. Février 2023. © Jean-Louis Crimon

Paris. Avenue Mozart. Antiquités 88. Février 2023. © Jean-Louis Crimon

© Jean-Louis Crimon

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4 décembre 2024 3 04 /12 /décembre /2024 08:57
Amiens. Place Léon Gonthier. Avril 2023. © Jean-Louis Crimon

Amiens. Place Léon Gonthier. Avril 2023. © Jean-Louis Crimon

© Jean-Louis Crimon

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3 décembre 2024 2 03 /12 /décembre /2024 08:57
Amiens. Rue de la République. 1er Juillet 2015. © Jean-Louis Crimon

Amiens. Rue de la République. 1er Juillet 2015. © Jean-Louis Crimon

© Jean-Louis Crimon

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2 décembre 2024 1 02 /12 /décembre /2024 08:57
Inverness. Ecosse. Août 1978. © Jean-Louis Crimon

Inverness. Ecosse. Août 1978. © Jean-Louis Crimon

© Jean-Louis Crimon

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1 décembre 2024 7 01 /12 /décembre /2024 06:32
Grandvilliers. Oise. La grande brocante. Juillet 2016. © Jean-Louis Crimon

Grandvilliers. Oise. La grande brocante. Juillet 2016. © Jean-Louis Crimon

© Jean-Louis Crimon

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30 novembre 2024 6 30 /11 /novembre /2024 07:57
Contay. Cimetière catholique. 22 Mars 2009. © Jean-Louis Crimon
Contay. Cimetière catholique. 22 Mars 2009. © Jean-Louis Crimon

Contay. Cimetière catholique. 22 Mars 2009. © Jean-Louis Crimon

La dernière image. L'image que voit, si ça tombe, celui qui vient d'être déposé dans sa tombe. Image mentale qui semble monumentale. Un jour, je saurai. Le plus tard possible, si c'est possible.

 

© Jean-Louis Crimon

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29 novembre 2024 5 29 /11 /novembre /2024 08:57
Amiens. La Confirmation. Avril 1961. © DR.

Amiens. La Confirmation. Avril 1961. © DR.

C'est le jour de ma communion solennelle, le jour du mauvais tour que m'a joué grand-père Maillet. Mon grand-père d'adoption. Mon vrai grand-père, grand-père Crimon, est mort très jeune. En 1922. L'année de naissance de mon père. Mort des suites du gaz moutarde de la première guerre mondiale. Gaz moutarde utilisé pour la première fois en Belgique, près d'Ypres, d'où son nom de gaz Ypérite. Terreur des champs de bataille. Même si, ont noté les historiens, ces gaz de combat n'ont été responsables que d'un petit nombre de morts. Petit nombre, tout est relatif : 90.000 morts sur les 10 millions de soldats tués dans la grande boucherie de 14-18.

Edouard avait donc épousé Edith, jeune veuve avec déjà deux enfants, Maurice, l'aîné, et Georges, le cadet, Georges qui sera mon père. Le jour de la communion solennelle, au beau milieu de l'après-midi, au moment où nous venions de regagner le choeur de la Cathédrale, grand-père Edouard, jusque-là irréprochable, ne se sentit soudain pas très à l'aise dans ses habits d'ouvrier. Pour la première fois de sa vie, la seule sans doute, Edouard eut honte de ne pas être comme les autres hommes, en impeccable costume croisé. Grand-mère Edith eut beau lui labourer les côtes de plusieurs coups de coude, rien n'y fit : Edouard était têtu, il ne bougea pas de son banc. 

Ce qui devait arriver arriva. Je suis le seul petit séminariste à me présenter devant Monseigneur l'Evêque sans parrain de confirmation. Entorse scandaleuse au rituel sacré. Je suis le mouton noir au milieu du troupeau d'aubes blanches. Tremblant de toute mon âme, je m'avance quand même - que puis-je faire d'autre ? - vers monseigneur l'Evêque, assis sur son trône, la main droite posée sur la crosse d'or et d'argent, le regard d'une sévérité terrifiante. 

- Et le parrain ? Où est le parrain ?

Mort de honte,  j'esquive : Je ne sais pas. Peut-être qu'il n'a pas pu venir. Mensonge. Mensonge, et nouveau péché. Je suis à nouveau pécheur. 

Placez votre main sur son épaule, lance alors l'Evêque au parrain de l'enfant qui me suit, dans la longue file indienne des aubes blanches. J'étais sauvé. Je bénissais le Ciel et la lettre C de mon nom de ne pas m'avoir placé en dernière position du cortège des Confirmants. Je trouvais géniale l'astuce de monseigneur l'Evêque, volant à mon secours, dans un réflexe aussi pastoral qu'inespéré. M'agenouillant, je baisais d'une piété redoublée son anneau d'or. J'allais pouvoir enfin lever la main droite sur le Livre Saint et dire à haute et intelligible voix la formule sacrée, cette formule déjà prononcée par une dizaine de mes camarades. Cette formule maintes fois répétée au cours de notre retraite préparatoire. Cette formule qui allait me faire entrer pour toujours dans la grande famille de Dieu.

Trop sûr de moi - péché d'orgueil - et, c'est vrai, un peu perturbé par le fait que grand-père Edouard n'ait pas tenu parole, et ne soit pas venu poser sa grosse bonne main d'ouvrier sur mon épaule, je clame le plus naturellement du monde, d'une voix claire et forte : Je jure fidélité à Satan et je renie Dieu pour l'Eternité.

Dans le regard de l'Evêque, je comprends que quelque chose d'anormal vient de se produire, quelque chose de grave qui n'était jamais arrivé auparavant. Mais pourquoi ? Pourquoi donc à cause de moi ? J'eusse souhaité mourir sur-le-champ, pour expier d'un seul coup ce qui devait être le plus grand des péchés mortels. J'essayais, dans un dernier sursaut, de rassembler mes faibles forces. J'étais désemparé, perdu, terrorisé, sans conviction devant l'irrémédiable - il y a diable dans irrémédiable

En vain, je tentais de reprendre le bon ordre des deux phrases. Je m'évertuais à replacer Dieu au bon endroit, pour effacer l'horreur de ce que ma bouche venait de proférer. Je n'y arrivais pas. J'étais sans voix. L'erreur était impardonnable. Je ne méritais aucun pardon. 

 

© Jean-Louis Crimon

Rue du Pré aux chevaux. Roman. (Pages 16,17 et 18). Le Castor Astral. 2003.

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28 novembre 2024 4 28 /11 /novembre /2024 08:57
Saint-Souplet-sur-Py. Le cimetière. 2 Nov. 2014. © Jean-Louis Crimon

Saint-Souplet-sur-Py. Le cimetière. 2 Nov. 2014. © Jean-Louis Crimon

Beauté triste des tombes solitaires

Anonyme passant passé trépassé

Pensée pour toi de moi qui passe

Passant qui passant pense à toi

Même si je ne te connais pas.

 

Comme toi je passe où tu es passé

Fausse passe ou impasse

Avec ou sans pass', je n'sais pas

Un jour comme toi je passerai

Sans trop d'envie, de vie à trépas.

 

© Jean-Louis Crimon

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