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28 février 2025 5 28 /02 /février /2025 08:57
Rubempré. Chez Casilda Vilbert. 16 Mars 1980. © Pascale Lavergne

Rubempré. Chez Casilda Vilbert. 16 Mars 1980. © Pascale Lavergne

Casilda. La musique du prénom déjà vous embarque. Prénom venu d'Espagne ou d'Italie. En fait, Casilda viendrait du latin casella qui signifie maisonnette. C'est dans sa maisonnette que Casilda m'accueille ce dimanche matin de la mi-mars quatre-vingt. Casilda et moi, on se connaît depuis plus d'un an. Depuis nos premiers enregistrements pour la radio, Radio France Picardie. Casilda est un personnage. Une femme originale. Qui n'hésite pas à aller à la ville en auto-stop. A près de 87 ans. Casilda le dit avec des mots bien à elle, des mots picards, pour elle, une langue naturelle, une langue vivante, non pas un patois moribond. Faire de l'auto-stop, en picard, Casilda dit ça comme ça : " J'm'in vo à l'sortie d'ech villache, pis j'foais l'pouce !" Faire le pouce, lever le pouce, faire signe. Les gens s'arrêtent. Casilda monte dans la voiture. L'aventure commence.

Casilda raconte : L'auto-stop, j'en foais tout le timps, je n'ai coère foait hier. J'avoais envie d'aller à Amiens. J'vais donc jusqu'au bout du villache, l'dernière moéson à droète, celle d'ech' notaire. Pis j'voés éne bielle voéture qui s'amène, avec éne dame tout' seule au volant. J'foais l'pouce, l'dame all' s'arrête, all' dit : où ch'est equ'vos allez, madame ? ej' dis : "à Pierregot" ! Pis, ej'monte dins s'voéture, et pis ej'd'vise avec l'femme. Gintimint. All' étoait bien gentille, l'femme-lo, pis all' causait bien. Elle m'a plu tout de suite. O causons, o causons... Pis elle me red'minde : allez-vous à Pierregot ou ailleurs. J'li dis : marchez, j'e m'rinvos qu'au soèr, j'ai l'timps, j'déchindrai plus loin, j'descendrai à Rainneville. Ch'étoait por êt' plus longtimps avec elle dins l'voéture. Pour causer davantage."

 

Elle est comme ça, Casilda. Ce qu'elle aime, c'est parler avec les gens. A tout jamais, elle est l'une des plus belles rencontres des mes débuts de journaliste. Je me souviens du chapeau, de l'accroche rédigée pour la Une du Courrier Picard, à l'occasion de la publication de son interview : "Ils n'écrivent pas, ils parlent, et s'ils écrivent parfois, c'est quand l'heure de la retraite a sonné et que leurs mains, enfin libres des outils, prennent le temps de dessiner des mots et des idées, pour dire cette terre picarde. Ils nous donnent alors avec des "mots-paroles", des "mots-images", non pas de la littérature, mais de la "vie livrée", liant à la perfection le vivre et le livre. Ils sont des livres vivants."

 

Je ne dirais pas mieux aujourd'hui. L'inconvénient, c'est que cette histoire, je l'ai écrite il y a plus de 45 ans. Je venais d'avoir 30 ans. J'étais un journaliste débutant. Maintenant, j'ai 75 ans. L'âge de commencer à mettre mes pas dans les pas de Casilda. Mais personne ne s'arrête quand je lève le pouce à la sortie de la ville et personne ne vient me demander comment je vois le monde et les gens. Personne ne vient chez moi le dimanche matin pour boire un café et m'interroger sur le sens de la vie.

 

© Jean-Louis Crimon

 

 

Articles consultables aux archives de la Bibliothèque Louis Aragon, rue de la République, à Amiens. 

Courrier Picard. 11/12 Août 1979. (En Une et page 3.)

Courrier Picard. 13 Août 1979. (Page 3.) 

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27 février 2025 4 27 /02 /février /2025 08:57
Emmanuel Bove. Lettre de Colette en sa faveur. © Jean-Louis Crimon
Emmanuel Bove. Lettre de Colette en sa faveur. © Jean-Louis Crimon

Emmanuel Bove. Lettre de Colette en sa faveur. © Jean-Louis Crimon

Une lettre de Colette de Jouvenel pour plaider la cause de "Mes Amis", le roman d'Emmanuel Bove. Lettre autographe signée, sur papier bleu garance, avec pour en-tête une adresse: 69, Boulevard Suchet, et un téléphone: Auteuil 06.27. Le document est intéressant, même s'il ne comporte pas de date précise. La lettre a vraisemblablement été écrite en 1924.

 

"Chère Madame, avez-vous lu le livre d'Emmanuel Bove, qui court sa chance auprès d'un jury dont vous êtes la plus belle jurée ? Ce livre est intitulée "Mes amis", et je vous défie de le feuilleter sans le lire tout entier.

"Cette misère de Victor Baton, c'est la misère de Bove. Mais seul son talent a le droit de compter. Donnerez-vous votre voix à Mes Amis ?

"Dans tous les cas, vous serez tentée de la lui donner. Je vous remercie quoi qu'il arrive, et je vous demande de me croire bien amicalement à vous."

 

Colette de Jouvenel

__

 

BOVE (Emmanuel), écrivain français (Paris,1898-Paris,1945)

Fils d'un père russe et d'une mère luxembourgeoise, découvert par Colette, admiré par Rilke, célébré par Beckett pour son "sens du détail touchant". On a pu dire de Bove qu'il  était "le romancier de la défaite et de la misère intérieures, le peintre de la médiocrité à l'état brut". Relire impérativement Mes amis,1924, Armand,1927, Bécon-Les-Bruyères,1927, Le crime d'une nuit, 1927, repris l'année d'après dans Henri Duchemin et ses ombres,1928, mais aussi La Coalition,1928, Petits Contes, 1929, Un homme qui savait, (La Table Ronde,1985), et enfin Le Piège, 1945 et 1986 (La Table Ronde).

 

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© Jean-Louis Crimon

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26 février 2025 3 26 /02 /février /2025 08:57
Amiens. Nov. 2016. © Jean-Louis Crimon

Amiens. Nov. 2016. © Jean-Louis Crimon

Cher petit piéton qui passe,

Laisser sa trace. Tout le monde en rêve. Tout le monde rêve de laisser sa trace. Tout dépend de la trace. Trace des pas dans la neige. Trace d'une semelle sur le bitume. Trace dans la mémoire des gens. Dans la mémoire du siècle. Trace dans la mémoire des mots.

"Sans comprendre pourquoi, dans la neige, il y a déjà la trace de mes pas". Tu le crois ou pas, mais c'est toi qui a dû écrire ça. Page cinquante de "Verlaine avant-centre", ton premier roman. Publié en janvier 2001. Au Castor Astral. Pas banal.

2001, Odyssée de l'espace, non pas. 2001, Odyssée de... laisse trace

 

© Jean-Louis Crimon

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25 février 2025 2 25 /02 /février /2025 08:57
 Rubempré. Casilda Vilbert. 16 Mars 1980. © Miguel Benadès / PMHP.

Rubempré. Casilda Vilbert. 16 Mars 1980. © Miguel Benadès / PMHP.

Casilda. Un personnage. Une octogénaire débonnaire. Une femme extraordinaire. Avec ce talent rare de savoir d'instinct mettre en scène les petits faits de la vie quotidienne. Un sens inné du récit. Boire le café en sa compagnie un dimanche matin de mars quatre-vingt, bonheur absolu. Bonheur bu à petites gorgées en soufflant un peu au début sur le bord de la tasse, à la manière des vieux d'autrefois.

Raison de notre rencontre : un projet de quatre par trois pour une campagne de publicité du Courrier Picard, Quotidien Régional qui passe pour être "un journal de vieux", curieusement l'oeuvre d'une Rédaction de "plutôt jeunes". L'idée de PMHP, Picardie Matin Havas Publicité, la régie publicitaire du Courrier de ces années-là : montrer le visage des journalistes pour montrer le vrai visage de la Rédaction. Forcément, refus unanime de l'ensemble de mes confrères. "On n'est pas des stars, encore moins des savonnettes. Nous ne sommes pas des journalistes de télévision, nous sommes des journalistes de presse écrite". Je suis le seul à d'emblée dire "oui". A une double condition : j'exige la maîtrise de la composition de l'image et je serai l'auteur du slogan publicitaire. Retour sur la conception d'une photo historique. "C'est vous qui faites le Quotidien", double sens et jeu de mots typiquement Crimonien.

 

© Jean-Louis Crimon

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24 février 2025 1 24 /02 /février /2025 08:57
 Amiens. Ene agache sus ch' mur ed'min gardin. Août 2016. © Jean-Louis Crimon

Amiens. Ene agache sus ch' mur ed'min gardin. Août 2016. © Jean-Louis Crimon

Ch'est ch'plus bieu oésieu d'min gardin. Ch'plus malan eussi. Quind al' déploait ses grindes ailes, m'n' agache, chés eutes volatiles, i trachent. Chés moénieux, ch'merle moqueux, pis s'fanme, el'merlette, ch'cope d'tourterelles, i savtent qu'i ne fonte point l'poéds. Jacache, al prind tout' l'plache. Pie Jacasse avu sin bieu plumache noér pis chés accints bleutés d'sus chés ailes et in tiot molé d'vert d'sus ch'queue. Ch'l'agache, ch'est vraimint fantastique, al' o éne mémoére étonninte : al s'souvient parfaitemint d'ses cachettes où c'qu'al o muché ses tiotes réserves à minger. Conme chés corbacs, ch' l' agache, in plus de s'mémoére du diab', al est capab' d'appreind' et pis minme de s'vir pis de s'miler dins in miroèr. Al est eussi capab' ed'prévenir ses comparses si al o perchu conm in dinger ou éne menache. Al peut coère apprind' à ses éfants c'qu'al o apprind elle-minme plus jone.

Paroait qu'des chientifiques qui étudient chés oisieux, d'z'éthologues in molé ornithologues, i z'ont vu d'z'attitudes, des comportemints avu quéque cose qui r'sanne à du sintimint, conm d'el compassion des humains. 

Chés agaches lo, al z'étouétent r'groupées tout eutour d'éne agache qu'al étoait meurte et pis, al' lui avoétent apporté de l'herbe, conm por li foaire éne tiote cérémonie de funérailles. Preuve qu'chés bêtes, minm à pleumes, pis à tiotes têtes, al n'sont point si bêtes.

 

© Jean-Louis Crimon

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23 février 2025 7 23 /02 /février /2025 08:57
Paris. Octobre 2010. © Jean-Louis Crimon

Paris. Octobre 2010. © Jean-Louis Crimon

Je suis entré très tôt dans la famille Séchan. Sans le savoir. A onze ans, pour mon anniversaire, ma mère m'avait offert "La Cachette au fond des bois". Mon premier livre vraiment à moi. Auteur : Olivier Séchan. Un beau jour, j'ai réalisé que l'auteur de mon livre préféré n'était autre que le père de mon chanteur préféré. Le père de Renaud. Renaud Séchan. Quand je lui ai confié à Renaud, que c’était son père qui m’avait donné le goût des mots et des histoires qu’on peut inventer avec, il m’a dit : « Si c’est mon père qui t’a donné envie d’écrire, on est frères. » C’était à la fin des années soixante-dix.

Dans l’histoire, j’avais gagné deux autres frères, David, le jumeau de Renaud, et Thierry, le frère aîné. Thierry Séchan, né en 1949, comme moi. En septembre. Moi, en août. On a fêté pendant un temps nos anniversaires ensemble. Pas ces dernières années. Notre dernière rencontre, c’était à Paris, avenue Reille, dans son petit appartement. Avant d’aller, le soir, au Zénith de Pantin écouter et applaudir le frangin. Thierry et moi, on était complices comme de vieux camarades qui partagent le même vice de l’écriture et la même admiration pour ces êtres incroyables qu’on appelle des chanteurs. Ensemble, on a publié, à L’Archipel, chez Jean-Daniel Belfond, une biographie kaléidoscopique, « Renaud raconté par sa tribu », une biographie écrite à quatre mains, pour mieux restituer toutes les voix qui entourent Renaud. Un temps, Thierry Séchan s’est perdu dans ce destin cruel d’être « frère de ». Ce qui n’avait rien d’évident à vivre. J’ai été témoin plusieurs fois, assis tous les deux en terrasse d’un bistrot parisien, des sollicitations incessantes des passants : « Renaud, on t’a reconnu, signe-nous un autographe ! » Et Thierry de dire : eh non, je ne suis pas Renaud, je ne suis que son frère. Mais les fans n’en croyaient rien et ne s’effaçaient qu’une fois l’autographe obtenu. Thierry me disait : si tu savais, tous les « faux Renaud » qui circulent… Heureusement circulent tout autant les vraies nouvelles et les vrais romans du frère aîné Séchan. Lui aussi, un vrai grand talent.

Ce soir, Thierry, je pense à toi et je te relis. Le meilleur hommage à rendre à un écrivain, à un romancier, c’est de le lire. De le faire lire. On peut sans doute vivre sans écrire, vivre une vie réussie sans écrire, mais nous sommes quand même un sacré paquet d’êtres humains à ne pas pouvoir vivre sans écrire, non pas pour entrer dans l’Histoire de la littérature, mais juste pour gagner un peu d’éternité temporelle. Un peu de cette éphémère éternité que les Dieux concèdent aux mortels que nous sommes. Thierry Séchan, je te le jure, tu mérites un peu, beaucoup, de cette éternité d’écriture.

© Jean-Louis Crimon

 

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22 février 2025 6 22 /02 /février /2025 08:57
Amiens. Automne 1980. "C'est vous qui faites le quotidien". © Miguel Benades

Amiens. Automne 1980. "C'est vous qui faites le quotidien". © Miguel Benades

L'affiche en 4 x 3. Casilda. Automne 1980. "C'est vous qui faites le quotidien". © Miguel Benades

© Jean-Louis Crimon

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21 février 2025 5 21 /02 /février /2025 08:57
Amiens. Jardin. 14 Juin 2020. © Jean-Louis Crimon

Amiens. Jardin. 14 Juin 2020. © Jean-Louis Crimon

© Jean-Louis Crimon

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20 février 2025 4 20 /02 /février /2025 08:57
Amiens. Rue Puvis de Chavannes. © Jean-Louis Crimon

Amiens. Rue Puvis de Chavannes. © Jean-Louis Crimon

© Jean-Louis Crimon

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19 février 2025 3 19 /02 /février /2025 08:57
Amiens. Jardin. 19 Février 2021. © Jean-Louis Crimon

Amiens. Jardin. 19 Février 2021. © Jean-Louis Crimon

Alors que le Merle noir avec son bec jaune vif est identifiable au premier regard, la Merlette est plus discrète. Sa livrée brune, légèrement tachetée sur le ventre, lui permet de passer inaperçue lorsqu'elle couve bien à l'abri d'un buisson ou d'une plante grimpante. Le lierre, la vigne vierge, le grand laurier à fleurs sont ses endroits préférés. 

 

© Jean-Louis Crimon

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