© Jean-Louis Crimon
Deux orfèvres. Orfèvres en jeux d'ombres. Normal, en face, c'est Le Quai. Le Quai des Orfèvres. Là, où on décide de vous mettre à l'ombre.
De loin, j'observe la scène. Je ne comprends pas. Je vois mais je ne comprends pas. Je ne vois pas ce qu'elles font. Ce qu'elles veulent faire. Sûr, à elles deux, elles font la paire. Je m'approche. Je me rapproche. Elles composent des ombres. Elles jouent aux ombres.
Dans les mains de celle de droite, prenant appui sur la tête, iPhone oblige, la photo se prépare. Marrant. Marrant vraiment. Scène de rue. Inattendue.
Elles vont se prendre en ombres. Prendre leurs ombres. Je tourne le dos à la Seine. Je contemple la scène. Regard sur le regard. Regard au second degré. Regard au second degré sur un double regard. J'ai trouvé. Je vais les prendre. Les prendre en train de se prendre. Les prendre en train de prendre leurs ombres. Photo de photo. Elles prennent leur ombre. Pas n'importe quelle ombre. Une ombre double. Ombre de leurs ombres. Ombre de leurs deux ombres.
Soudain, trouvaille fulgurante. J'ai vu. Je vois. Les bras au-dessus des têtes font la paire. Les bras forment des yeux. Des yeux. Deux yeux. Visage d'ombre qui regarde de face les deux silhouettes que je ne vois que de dos. Silhouettes amies de deux amies. Deux amies qui jouent en plein soleil. Jouent à faire des ombres.
Un seul regret: n'être pas du nombre. Ou plutôt: n'être pas d'une ombre.
On se console comme on peut.
Moi qui persiste à ignorer Photoshop, j'ai... chopé la photo.