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16 septembre 2016 5 16 /09 /septembre /2016 19:10
Chereng. 16 Sept. 2016. © Jean-Louis Crimon

Chereng. 16 Sept. 2016. © Jean-Louis Crimon

Cher pauvre mortel,

 

Tu ne t'y feras jamais. A 7 ans déjà, enfant de choeur déjà, tu sais que tu as un problème avec la mort. Tu ne comprends pas pourquoi la vie doit finir comme ça. Tu ne comprends pas comment les vivants trouvent la force d'accepter d'une façon aussi sereine la mort de l'un des leurs. A nouveau, cette année, te revoilà face au cercueil d'un de tes amis. Depuis Janvier, ce doit être la quatrième fois. Comme à chaque fois, tu es sensible à la beauté sobre d'une église où les familles, les enfants, les proches, se rapprochent. Sans trop laisser transparaitre leur souffrance ou leur peine. Comme si la mort pouvait avoir cette apparence paisible et tranquille d'une fin de matinée d'été.

Le prêtre t'a semblé parfait dans son rôle d'intercesseur. Tu aurais aimé aller le saluer après l'office, mais il est parti très vite. Il avait ailleurs un autre rendez-vous. Une messe de mariage à célébrer. Il a eu la simplicité de glisser cette précision dans son homélie. Tu as pensé, tout bas, une messe de mariage après une messe d'enterrement, sans doute aussi un baptême, sûrement le lot du curieux métier de représentant de Dieu.

Tu aurais aimé lui dire à cet homme, même si tu as toujours du mal avec la belle histoire de la vie éternelle, que tu l'as trouvé plutôt bien dans sa manière de faire. Plutôt juste et réconfortant. Même si un TGV qui tombe en panne en rase campagne l'a privé, lui et ses fidèles, de l'hommage prévu d'un père jésuite, grand ami du défunt. Comme si celui qui, tout au long de sa vie, - ce n'est pas médire que de le dire -, avait méthodiquement failli à tant de rendez-vous, se trouvait à son tour victime d'un rendez-vous manqué. Quelques uns en ont souri, pas seulement intérieurement.

Un de vos amis communs, un ami hors du commun, un ami toujours bien vivant, lui, et qui a toujours un incroyable sens de la formule a résumé l'être humain aujourd'hui disparu :

Il était parfaitement imparfait, comme nous tous.

 

Ainsi, l'ami qui, tout au long de sa vie, avait su être, avec une réelle application, si souvent absent, a fini par s'absenter pour toujours. Toi, tu as du mal à l'accepter. Tu as eu à peine le temps de lui dire que, pour toi, il avait été important. Que tu n'oublierai jamais la chanson No mas et l'étude joyeuse de Spinoza. Ton petit mot est arrivé juste à temps. Paraît qu'il en a souri sur son lit d'hôpital. Tu n'en sauras pas davantage.

D'autant plus dommage, côté vivants, de ne faire l'effort de se retrouver que pour les enterrements, et pas un peu avant, quand le mort est encore...vivant.

 

 

 

© Jean-Louis Crimon

 
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