Que l'on arrive par la rue de Rouen, la rue Dom Bouquet, le Boulevard Carnot, la petite rue Le Nôtre ou le Boulevard Maignan-Larivière, elle semble imposante et fière. Résolument moderne. L'Eglise Saint-Honoré -celle que nous connaissons aujourd'hui - est en fait la nouvelle Eglise Saint-Honoré. La première a été détruite dans les bombardements allemands de Mai Quarante.
Le 19 mai 1940, - très précisément - la première Eglise Saint-Honoré, qui avait déjà subi d'importants dégats en 1918, est réduite en un tas de pierres et de ruines. Dans l'un de ses volumes conscrés à la chronique des rues d'Amiens, Paule Roy raconte comment elle a été elle-même témoin, ce dimanche 19 mai 1940, vers midi, de ces bombardements aériens qui lui parurent durer, selon ses propres termes, "un temps infini". Née en 1914, Paule Roy avait 26 ans et se souvenait que Saint-Honoré avait été sa paroisse jusqu'en 1928. Elle était donc restée très attachée à cette église. Alors, quand les bombardements s'arrêtèrent et que le calme revînt, avec quelques Amiénois qui, comme elle, s'étaient entassés près du grand portail, pour teneter de se mettre à l'abri, elle vit venir vers elle un soldat Belge qui s'exclama : "Dis, mademoiselle, il y avait une église ici... eh bien, il n'y en a plus ! "
Il a fallu attendre dix-sept ans, jusqu'en 1957, pour que le chantier de la reconstruction de l'Eglise Saint-Honoré démarre véritablement. Il fût décidié que la nouvelle Eglise serait un édifice tout en pierres, inspiré du Pavillon Pontifical de l'Exposition International de 1937, à Paris. Si la première Eglise Saint-Honoré était néo-gothique, la seconde Eglise Saint-Honoré serait plutôt Arts Déco. Gogois, Evrard et Tournon, (gendre d'Edouard Branly), ont été les trois architeces choisis pour cette reconstruction.
Aujourd'hui, en janvier 2020, le passant distrait pourrait croire, comme je l'ai cru longtemps, que les personnages représentés au frontispice de l'édifice religieux sont tout simplement les Rois Mages... Problème : il y a quatre personnages et les Rois Mages n'étaient que trois, Gaspard, Melchior et Balthazar.
Il ne s'agit donc pas des Rois Mages, mais de quatre Evêques, Quatre Grandes Figures d'Evêques entourant la Croix des Chrétiens : comme on disait en ce temps-là, un NOIR, un JAUNE, un ROUGE et un BLANC, pour illustrer et incarner la parole évangélique gravée juste au dessus des quatre personnages, "Allez, Enseignez toutes les Nations". Mosaïque qui est l'oeuvre de Florence Tournon, la petite fille d'Edouard Branly.
© Jean-Louis Crimon
Chronique écrite à la demande de France Bleu Picardie et diffusée le 10 Janvier 2020.