Il fait frais. On a perdu dix degrès en une journée. Curieuse sensation de froid. Si soudaine. Pull en laine. Les passants n'ont plus le coeur en été. Ni l'allure, ni les rires, ni les paroles. Les conversations ont changé de ton. Le quai se prépare à entrer dans ses habits d'automne. Nouveaux habits pour rompre les habitudes. Les habits, les habitudes. Enfant, j'aimais bien la proximité des deux mots. Je pensais : si on peut changer d'habits, on doit pouvoir changer d'habitudes. D'habits, chez nous, il n'y en avait pas trop. Comme les chaussures. Une paire unique, pointure plus grande, pour durer deux années. Comme les idées. Mais déjà je me sentais riche de mots. Les mots : les chaussures et les habits des idées. Plus tard, je me suis inventé une formule : les idées, c'est comme les chaussures, pas à votre pointure, ça risque de vous empêcher de marcher.
L'été s'en va. L'automne est déjà là. Moi, j'aime bien. J'aime toutes les saisons. Même si, à chaque fois, je me pose les mêmes questions. Est-ce que l'automne salue l'été quand il le croise ? Est-ce qu'il lui demande : Comment ça a été, cette année, l'été ? Et puis, entre deux pluies, est-ce que l'été demande à l'automne s'il a encore de nouveaux habits pour la rentrée ?
Questions d'enfant. Questions d'un autre siècle. Le nouveau est trop imperméable. Questions qui ne sont, pardon, plus de... saison !