Dernier jour de quai, avant longtemps. Transmis les clefs à mon ouvre-boîte. Un type super. Un vrai frère. En commun, le goût des mots des livres et une vraie passion pour la photographie. Le noir et blanc. L'argentique. L'ouvre-boîte, l'alter ego, l'autre soi-même, le double, le complément. Celui qui fait que les boîtes vertes sont toujours ouvertes.
Dernières ventes plutôt modestes. Trois Poches et un Pélerin. Numéro 2431 du 19 août 1923. Cinq euros. Prix cadeau. A une dame très pieuse que la Une, consacrée à Lourdes et à Bernadette Soubirous, semblait vraiment fasciner. Trois poches à un passionné de romans policiers. Du classique, rien que du classique. Le Mystère de la chambre jaune, Le bouchon de cristal et Les indiscrétions d'Hercule Poirot. Leroux, Leblanc, Christie. Tiercé gagnant. Gaston Leroux, Maurice Leblanc et Agatha Christie. Huit euros les trois. Treize euros de recette. Juste de quoi payer un pot à mon ouvre-boîte. Avant de se dire au-revoir. Ce qui veut dire qu'on se reverra. Dans quelque temps. Un certain temps. Le temps de l'absence est venu. S'absenter. L'autre façon de nommer l'exil. Accolade fraternelle. Plaisanteries. Eclats de rires. Puis simple sourire. Partir, c'est sourire un peu. Dans les bourrasques du vent d'automne, être en marche, toujours, et se tenir debout. Même sur le quai, je ne me suis jamais assis.
Qu'importe, navire en cale sèche, ou vent debout, qu'il insupporte ou qu'il vienne à manquer, le bouquiniste du bout du quai a mis les bouts.