Elle venait de Clermont. Pas de Clermont-Ferrand. De Clermont. De Clermont de l'Oise. En Picardie. Elle cherchait un livre pour sa mère. Un livre qui ferait plaisir à sa mère. Un livre qui plairait à sa mère. Je lui demandais quels étaient les auteurs que sa mère pouvait bien aimer. Ma question ne la dérouta point. D'un geste sans ambiguïté, elle écarta cette piste de recherche. Sa réponse m'intrigua : pas d'auteur en particulier. Elle ajouta : ma mère n'aime pas les romans. Pas les fictions. Mon regard dût l'inciter à poursuivre. Elle m'expliqua ce qui, pour elle, semblait naturel. Elle résuma en une phrase très explicite : ma mère n'aime que les histoires vraies. Des choses qui se sont vraiment produites, qui sont vraiment arrivées. Des récits de vie. Des témoignages. Des faits divers. Elle ajouta, sans gêne aucune : surtout des histoires de crimes. Moi qui ne supporte pas les polars dès qu'il y a trop de morts, je ne dis pas que ça me glaça le sang, mais la chose me fit un drôle d'effet.
Elle consacra un bon quart d'heure à passer en revue le contenu de chaque boîte. Avec un réel talent. Elle ne s'arrêtait que sur des titres intéressants. Soudain, dans un cri de joie, elle se saisit d'un ouvrage dont le titre illumina son visage. Elle m'avoua avec une réelle satisfaction : je crois que j'ai vraiment ce qu'il me faut. Ajoutant, assez fière de sa trouvaille : sûr, ça va vraiment lui plaire. Titre de l'ouvrage, paru, en 2002, au Pré aux Clercs : Femmes et criminelles. A l'intérieur, aucun doute, de quoi faire plaisir à sa maman. D'abord une préface au titre très attractif : Les assassines. Surtout des chapitres qui portent les noms de ces célèbres meurtrières. Joli panel. Belle brochette. Parmi les plus connues : Christine et Léa Papin, les âmes siamoises. Violette Nozières, l'ingénue parricide et Simone Weber, la diabolique. Je m'abstîns de tout commentaire. Même si, au fond de moi, une petite voix pensa : curieuses lectures.