Elle voulait L'Assommoir, j'avais La Bête humaine. Notre discussion a commencé comme ça. De Zola, elle voulait tout lire. Se disait naturaliste. En Poche, j'avais deux ou trois titres des Rougon. Les Rougon-Macquart, ça la fascinait. Comme la fascinait l'ambition de Balzac. Balzac et sa Comédie humaine. Elle n'avait pas trente ans et son monde, ce n'était pas Houellebecq, Beigbeder, Christine Angot ou Amélie Nothomb. Elle n'avait pas trente ans et la littérature contemporaine ne l'intéressait pas. Pas du tout. Elle n'avait pas trente ans et de Balzac, je lui conseillai La Femme de trente ans.
Balzac qui salua le travail de Creuze, en peinture, pour faire entrer dans la toile, pour la première fois, les petites et les grandes misères des petites gens. La beauté simple de ceux du peuple. La Laitière, belle, simplement belle, belle et vraie, dans la lumière vraie, sans pose ni manière.
Au fil de la conversation, je lui confie soudain ce projet délirant: inventer le CAC 40 de la littérature. La Cotation des Auteurs en Continu. Les 40 auteurs les plus connus à la Bourse des valeurs littéraires. Une Bourse où enfin la valeur ne sera pas financière. Un éclat de rire pour finir. Entre deux gorgées d'eau. Il faisait chaud. Un éclat de rire entre deux éclats d'eau bue.