Paris. Novembre 2012. © Jean-Louis Crimon
Tout le monde le voit. Personne ne le regarde. On se dit : il a bu. Il a dû boire. Il cuve son vin. Sans comprendre que, peut-être, il est à jeun. Il a faim. Il n'a rien mangé depuis longtemps. Quand on a faim, parfois, on a sommeil. Qui dort dîne. Sans doute la triste vérité de l'homme qui dort dans la cabine.
Il n'a pas bu. Il est au rebus. Sa vie est un rébus. La vie ne tient qu'à un fil. Qu' à un coup de fil. Le combiné n'est pas loin, mais la main s'est endormie en fermant le poing. Main gauche posée sur le genou. Protectrice. Position foetale. Pour éviter la position fatale. D'instinct. Se rêver, dans son sommeil, un autre destin.
Sûr que si c'était un chien ou un chat, recroquevillé dans la cabine, personne ne resterait insensible. Ô le pauvre chien, l'adorable Toutou ! Ô le mignon minou ! Je les entends déjà, les braves gens. Et je t'apporte des croquettes. Et je t'emmène chez moi. Mais c'est un homme. Juste un homme. Un homme qui a faim. Un homme qui a froid. Un homme qui est mal. Pas un animal.
Alors, mon vieux, c'est normal, c'est banal, c'est humain, on passe notre chemin, et toi, l'homme, tu dors... dehors.