Deux crucifiés pour une seule croix, je ne m'y ferai jamais, je crois. Un crucifié, c'est insupportable. Se recueillir auprès de cet homme sans cesse agonisant, prier pour lui, à genoux le plus souvent, en levant les yeux vers ses mains clouées, ses pieds cloués pareillement. Quel Dieu pervers a inventé pareille histoire et croire que ça nous ferait croire ?
Jésus fils de Dieu fait homme, faut voir comme ton père t'a si mal aimé. Au point qu'au moment fatal, tu lui as même balancé : Père, père, pourquoi m'as tu abandonné ? Eli, Eli, lema sabactani ?
Tu vois, j'ai bien appris ton catéchisme, mais très vite, m'en suis tenu au schisme. Au diable, la belle histoire du Fils éternel, le Fils sans péché, qui donne sa vie pour nous sauver, nous, les hommes, éternels pauvres pécheurs.
A 9 ans, mon petit seau d'eau bénite main gauche, le goupillon main droite, à chaque enterrement, dans mon aube rouge et blanche, je les voyais tous, un à un, défiler devant moi, pour bénir le cercueil de celui ou de celle qu'on allait mettre en terre et, dans leur regard, je cherchais l'étincelle de cette foi en la vie éternelle. En vain.
© Jean-Louis Crimonr