« Bouligny, ses mines, ses cités », le titre du Mémoire soutenu, en Juin 1977, par Marie-Danielle Harbulot, me touche plein cœur. Ma mère, Juliette Leloup, fille de Berthe Leloup et de Francesco Zanda, est née le 2 août 1928, à Bouligny. Nouveau clin d'œil du destin.
Ce Mémoire, dirigé par François ROTH, Professeur à l'Université de Nancy II, comporte cinq chapitres en 130 pages de texte et de tableaux statistiques. Un beau travail universitaire motivé, - précision de son auteur dès l'Introduction - par des "attaches avec ce département de la Meuse". Joliment dit. Discrètement dit. C'est toujours agréable de savoir que les objets d'études sont rarement des exercices de style désincarnés.
Ces attaches d'une étudiante de l'année 1977 avec ce département de la Meuse et avec son pays minier, je les partage bien volontiers. Je me sens pays avec Marie-Danielle Harbulot que je ne connais pas et que je n'ai jamais rencontrée. Son Mémoire - pardon, c'est facile, mais tellement tentant- est une "vraie mine" pour moi. J'y apprends tout ce que je ne savais pas :
Que Bouligny, village de 318 habitants en 1901, devient dans les années 30 la quatrième agglomération du département de la Meuse, après Bar-le-Duc, Verdun et Commercy.
Qu'avant la première guerre, et de 1919 à 1926, la population de Bouligny et les effectifs des mines augmentent fortement et qu'un grand nombre d'immigrants sont alors célibataires.
Qu'en 1924, sur un total de 11.768 mineurs, 25 % sont Français, 63 % sont Italiens et 6% sont Polonais. 6% sont de différentes autres nationalités. (Rapports annuels du Service des Mines).
Que 28.000 hommes se font inscrire sur les registres matricules des deux mines de Joudreville, entre 1906 et 1945.
Qu'on appelle "Les Grandes Grilles" les maisons - assez austères- des cadres et la spacieuse demeure du Directeur de la mine.
Que les "Grandes Grilles" ont été volontairement construites à l'opposé des cités ouvrières. Que ça se voit très clairement sur le plan en page 74.
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La Conclusion de Marie-Danielle Harbulot, page 109 de son Mémoire, est à la fois touchante et désespérante. "Trop d'archives ont disparu... Trop d'études manquent". Je la reproduis in extenso :
" Depuis un demi-siècle, Bouligny a incomparablement enrichi son histoire; cette histoire reste à écrire : trop d'archives ont disparu ou ne nous ont pas été communiquées pour que cette monographie puisse rendre compte de toute la réalité. Trop d'études manquent pour que l'originalité de Bouligny puisse être affirmée à coup sûr : menée à l'échelon de tout le bassin de Briey, la comparaison des entreprises, du peuplement, des cités, des comportements politiques et syndicaux permettra peut-être, un jour, de fructueuses moissons. "
Juin 1977 - Juin 2017, 40 ans plus tard, on est en droit de se demander ce qui a bien pu être écrit, étudié et publié sur ce plan là. Une rencontre avec l'étudiante de 77 et son directeur de Mémoire serait précieuse pour mesurer le chemin parcouru ou à tout jamais abandonné.