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5 février 2022 6 05 /02 /février /2022 08:27
Saint-Malo. Grands Voyageurs. Mai 2015. © Jean-Louis Crimon

Saint-Malo. Grands Voyageurs. Mai 2015. © Jean-Louis Crimon

 

Depuis que je me suis remis à la photographie, j'ai le sentiment d'avoir manqué ma vie. De m'être égaré bien trop longtemps dans l'univers des mots et des idées. Même si  j'y ai pris du plaisir. Beaucoup de plaisir. Les mots, écrits et publiés dans le journal, ou parlés à la radio, étaient ma raison d'être, mon pain quotidien et, soyons lucide, mon gagne-pain. Mon gagne-pain quotidien. C'est la vie, c'est ma vie, me suis-je dit. J'ai renoncé à la photo. Sans réaliser alors la gravité du renoncement. J'ai trahi mon premier amour. Je me suis trompé de vie.

 

Ma boîte à images, mon boitier, mon 24x36, - selon les années, Mamiya ou Minolta, Praktica ou Leica -, je les ai abondonnés pour mon clavier AZERTY et mon micro Sennheiser. Conséquence : mes négatifs, soigneusement développés et coupés par bandes de six vues, ont dormi, à l'abri de la lumière et de la poussière, pendant trois ou quatre fois dix ans. Aujourd'hui, ils sont intacts. Comme neufs. Commme développés, et séchés, il y a quelques heures à peine. Comme si les images argentiquement supportées et transportées à travers le temps, avaient été prises la veille ou l'avant-veille.

De fait, le destin de ces images est vraiment extraordinaire. Ce n'est pas si courant que des photos, prises au début des années 70, 1970, ne soient "révélées", au sens photographique du terme, que quarante ans plus tard, dans les années 2010. Façon d'éprouver les instants saisis dans la dure et longue durée du temps. Mise à l'épreuve qui se prive justement des épreuves. Mes négatifs n'ont pas bougé. Certaines photos, mal fixées, deviennent sépia. J'ai, en n'effectuant aucun tirage sur papier, échappé au sépia. La photo sépia. Mais je n'ai pas échappé à "la photo s'épia". Du Devos ou du Lacan dans le texte. Si Lacan avait été photographe. Le Leica de Lacan, joli titre pour mon prochain roman. Un photo-roman. Pas un roman-photos. Pas une histoire d'amour un peu mièvre. Non, un photo-roman. Un livre où les photos sont, non pas simple ponctuation, mais vraies têtes de chapitre. Cadrent le décor. Inventent une autre histoire. Une histoire dans l'histoire. Un photo-roman uniquement fait d'instants. Instants non pas décisifs. Instants essentiels et dérisoires à la fois. Fragments choisis d'une histoire écrite en pointillés. Instants suspendus sans succomber aux points de suspension.

 

© Jean-Louis Crimon

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