La radio : un apprentissage redoutable. La manière d'écrire, - à la radio, le journaliste écrit son texte avant de le parler -, la façon de construire l'information, le style et le ton, la forme, tout était aux antipodes de ce que j'avais cru maîtriser au cours de mes trois années de presse écrite.
A la radio, il faut très vite comprendre tout l'intérêt de dire "La vie est dure" plutôt que "L'existence est difficile". Même si renoncer au beau concept d'existence, pour le professeur de philosophie que j'avais été, c'était à la fois triste et motivant. Motivant d'accepter l'idée qu'une écriture efficace passe par le choix des mots. Une écriture efficace pour une parole immédiatement compréhensible. Préférer le monosyllabique aux trois ou quatre syllabes. Dire au micro : "Bonjour, La vie est dure", c'est être tout de suite compris par tout le monde. Dire : "Bonjour, L'existence est difficile", c'est déjà se situer à un autre niveau. Les auditeurs d'une radio régionale, même appelée Radio France, ne sont pas les auditeurs de France Culture. Je le vérifierai vingt ans plus tard. Par un nouveau très beau hasard.
Débuter, presque par hasard, dans le grand Quotidien de presse écrite de sa ville, faire ses gammes dans la radio régionale, apprendre le métier en région, avant de passer au national, puis à l'international, ce fut une chance inouïe. Il y a "ouïe" dans "inouïe". Il fallait juste savoir être à l'écoute. Être à l'écoute et avoir l'oreille. Le bon chemin pour se forger un destin.
© Jean-Louis Crimon