Cher toi,
Jadis et Naguère. Paris. Léon Vanier, Libraire-Editeur. 19, Quai Saint-Michel, 19. Nouvelle Edition. 1891. Dit comme ça, sûr, ça n'est pas très excitant. Pas très attirant. Sans nom d'auteur, est-ce moins flatteur ? Le recueil se compose de deux parties. L'auteur l'a voulu ainsi. Cette pièce - on dit comme ça - se trouve dans Jadis. Pages 19, 20 et 21. Elle est dédiée à Charles Morice. Son titre : Art Poétique. La première strophe est la plus connue, si bien chantée par Léo Ferré, qui préfaça, naguère, dans la collection du Livre de Poche, les "Poèmes Saturniens". Quatre premiers vers fantastiques, tout est dit et tout reste à faire, vous ne pouvez pas ne pas les connaître :
De la musique avant toute chose,
Et pour cela préfère l'Impair
Plus vague et plus soluble dans l'air,
Sans rien en lui qui pèse ou qui pose.
Plus loin, redoutable conseil à tout rimailleur débutant. Que tu es toujours et pour longtemps. Variante: Que tu es depuis longtemps et pour toujours. Le conseil en question :
Prends l'éloquence et tords-lui son cou !
Tu feras bien, en train d'énergie,
De rendre un peu la Rime assagie.
Si l'on n'y veille, elle ira jusqu'où ?
Sans oublier la fin, superbe fin, devenue précepte ou proverbe:
Que ton vers soit la bonne aventure
Eparse au vent crispé du matin
Qui va fleurant la menthe et le thym...
Et tout le reste est littérature.
Verlaine, bien sûr. Verlaine. Relire Verlaine. Chaque soir de la semaine. Toujours et encore. Relire Jadis et Naguère. Relire Verlaine. Des comme lui, y'en a plus guère.
© Jean-Louis Crimon
Première parution : 5 Avril 2016.