Un Poche dans la poche. Le titre dépasse. Dépasse de la poche. Poche en cuir d'une veste en cuir. RER. J'hésite. Je cadre. Je flashe. En fait, j'ai flashé sur le titre. Le Gai Savoir. Nietzsche. Friedrich Nietzsche. Lecture lointaine. Année 1972. Licence de Philosophie. Angèle Kremer-Marietti. Prof adorable. Cours fabuleux. La belle Angèle, nous en étions tous amoureux.
Envie de relire Nietzsche. Un désir de lecture, à quoi ça tient ? A peu de choses. Un quai de RER. Un Poche qui dépasse d'une poche.
Idée de reportage. Idée soudaine. Faire la photo systématique de tous ces livres qui se lisent là où, au départ, on ne vient pas pour lire. Dans les bus, les trains, les avions. Les gares, les aéroports. Les quais. Les portes. Les portes d'embarquement. Tous ces endroits de lecture peu communs. Lieux pourtant communément devenus les endroits où on lit désormais le plus.
J'aimerais mettre en commun toutes ces lectures personnelles. Privées. Lectures privées dans l'espace public. Lectures privées dans tous ces lieux dits publics. Photos insolites. Inattendues. Volées. Dérobées. Concédées. Acceptées. La lecture "surprise" dans tous ses états. Une photo de livre par jour. Tout au long d'une année. 365 titres de ce qui se lit, aujourd'hui, ici, à Paris. Dans des situations pas toujours très confortables. Métros bondés. Heures de pointe. Matins blêmes ou soirs d'hiver.
Mais, en fait, d'où vient cette manie de lire dans les Transports en commun ? Qui, la première, ou le premier, osa ? Le journal, passe encore, c'est banal, c'est normal. Mais un livre, un roman. Un vrai livre. 200 pages ou davantage. Dans nos trajets quotidiens. Dans les Transports en commun. Qui peut me dire comment et pourquoi ? Personne.
Si, moi, je sais pourquoi. C'est la lecture qui nous transporte.
© Jean-Louis Crimon
Première parution : 18 Déc. 2012.