Je suis arrivé au Courrier Picard le 1er Juillet 1979. Stagiare d'été, pour deux mois, m'a dit Georges-Louis Collet, rédacteur en chef historique du grand quotidien de la rue Alphonse Paillat. Ajoutant avec ce sourire plein de malice : Pour plus longtemps, si vous êtes bon. On m'a dit que vous savez écrire, prouvez-le moi ! Le genre d'encouragement qui vous met une pression immense et d'emblée à l'aise. Les deux mois d'été durèrent presque quatre ans. C'est dire le travail et le talent dont je dus, sans vraiment en être toujours très conscient, faire preuve.
Seul bémol à cette belle aventure dans la presse écrite régionale, l'obligation de poser définitivement mon appareil photo. Ch'Courrier avait cinq reporters photographes qui ne supportaient pas que le rédacteur débutant que j'étais, par la définition de fonction qui m'avait été attribué, empiète sur leur domaine de compétences. J'ai bien essayé de faire la sourde oreille, au tout début, de finasser, un peu, beaucoup, ensuite, mais j'ai vite compris que nos relations cordiales, sinon confraternelles, en prendraient un sacré coup pour un paquet d'années, si je persistais dans ma double activité.
J'étais simplement, comme souvent, un peu trop précurseur. Aujourd'hui, c'est un fait acquis : le journaliste rédacteur est aussi journaliste photographe. Ou plutôt : le journaliste doit aussi faire ses propres photos. Avec plus ou moins de bonheur ou de talent. C'est flagrant. Le journal s'en repent.
© Jean-Louis Crimon