Amiens. Au bout du quai Parmentier. Pont Baraban. Juin 1974. © Jean-Louis Crimon
Quartier Saint-Leu, la Place Parmentier, et le Quai du même nom. Parmentier, bien sûr, c'est Antoine-Augustin Parmentier, né à Montdidier, dans la Somme, en Picardie. Pharmacien militaire, (au temps de Louis XVI), qui révolutionnera nos habitudes alimentaires. Camarade Tubercule dont les dictionnaires résument en une toute petite phrase la vie et l'oeuvre :
"Parmentier vulgarisa en France la culture de la pomme de terre."
Une autre fois, nous ferons le portrait de cet homme qui, à n'en pas douter, devait être un Chips type. Retour donc à Saint-Leu, au quartier Saint-Leu, au Quai Parmentier et à la Place Parmentier. Selon Paule Roy, indiscutable grande chroniqueuse des rues d'Amiens, c'est le 23 Mai 1882 que les hortillons s'installent pour la première fois sur la nouvelle Place Parmentier, pour y vendre leurs légumes et leurs fruits, cultivés et récoltés, du côté de Rivery et Camon, dans les riches terres des hortillonnages.
Le Quai Parmentier avait été aménagé pour servir de débarcadère aux barques à cornet qui s'aglutient par dizaines, le long du quai, les veilles de marché. De nombreses cartes postales anciennes, des années mille neuf cent, 1910, 1920, 1930, en témoignent superbement. D'un point de vue autant sociologique qu'esthétique.
Un mot de la barque à cornet, ce bateau des hortillons à fond plat, avec cette partie surélevée si caractéristique qui permet d'accéder assez facilement au quai, mais aussi aux aires, les terres des hortillonnages. Véritable proue, en forme de cornet, munie de grosses nervures de bois formant comme un mini escalier.
On a appelé de façon très poétique, mais aussi très éloignée de la réalité, ce Marché des hortillons de la Place Parmentier, Marché sur l'eau. En fait, le marché ne se déroulait pas sur l'eau, mais sur la terre ferme, et même sur le pavé, plus tard sur le bitume, de la Place Parmentier. Là aussi, les photos, les cartes postales anciennes, en témoignent superbement.
Un regret, un seul : que les 300 familles d'hortillons que faisaient vivre les 300 hectares des hortillonnages, au tout début du vingtième siècle, ne soient plus aujourd'hui qu'une dizaine, et que les marchés, autrefois au rythme de trois par semaine, aient complétement disparus de la vie amiénoise. Pour ne réapparaître qu'une fois par an dans une version touristique pas toujours du meilleur goût.
Que voulez-vous, les temps changent, les temps ont changé, et parfois -foi de Parmentier - on n'est pas loin de le regretter.
© Jean-Louis Crimon
Chronique écrite à la demande de France Bleu Picardie et diffusée le 14 novembre 2019, à 6 heures 20 et à 16 heures 20.