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Au fond, - expression de circonstance pour parler de la mine - depuis bientôt quinze jours, je n'ai guère progressé dans ma quête de ce grand-père inconnu, disparu, perdu. Rien sur mon grand-père dans les rares documents de la Mine de Joudreville aux Archives Nationales du Monde du Travail. Normal, ce ne sont pas les Archives Nationales du Monde des Travailleurs. Nuance. Exactement comme pour "Fête du Travail" et "Fête des Travailleurs". Pas la même chose. Pas la même histoire. Pas le même sens. Quand on essentialise le Travail, on oublie les Travailleurs. On falsifie la vie sociale. On nie l'existence de ceux par qui le Travail existe. Elémentaire. Et les menteurs... au travail, te refont l'histoire.
Alors je décide de réorienter mes recherches du côté de la presse locale et syndicale. Ai trouvé ce matin, au pays d'Internet, une ligne sur une grève à la Mine de Joudreville. In Le Peuple, organe de la CGT, No 3268, 24/12/1929. Décembre 1929, Juliette Zanda, ma mère, ta fille, a presque déjà un an et demi.
Titre on ne peut plus informatif, dans le journal de la CGT :
LES MINEURS DE FER DE JOUDREVILLE SONT EN GREVE.
Si tu n'es pas mort le 2 Août 1928, comme ma mère l'a toujours cru et affirmé, toi, Francesco Zanda, toi "l'agitatore", toi, le Sarde militant, sûr que tu devais être du côté des grévistes. Le leader du mouvement, sûrement. Bien sûr, j'ai acheté le journal. Dois le recevoir d'ici cinq à six jours. J'espère que l'article en pages intérieures sera à la hauteur de l'Appel en Une. Que ce ne sera pas une simple brève. Que j'apprendrai que tu étais toujours vivant en Décembre, donc pas mort en Août.