Cher passager clandestin,
Au fond, tu es chanceux, vraiment chanceux. Tu auras eu de la chance comme être humain. Même si dans cette vie tu te sens en permanence passager clandestin. Mais il y a "destin" dans "clandestin". Ce n'est pas pour te déplaire. Destin du clan. Clan du destin. Tu t'en fous. Tu as dû te tromper d'époque. Reste que dans cette époque, tu es chanceux, terriblement chanceux. Dans ta vie de mortel, tu en as rencontré des gens. Des gens fascinants. Des personnes. Des personnages. Des personnalités. Des anonymes ou des célébrités. Ta dernière rencontre vaut son pesant d'humanité. Ce Velibor Čolić est vraiment un être extraordinaire. Il écrit comme il parle. Il parle comme un écrivain. Il a le sens de la formule, ou plutôt il a la formule du sens. Il saisit une image, il te la tourne, te la retourne, et de l'image, il te sort une idée. Il est comme ça, Velibor. Son regard, ses paroles, ses mots, c'est de l'or. D'avoir croisé sa route, sans aucun doute, ça te change une vie, ça te change ta vie.
Tu n'arrêtes pas depuis deux jours de relire à haute voix des passages entiers de son Manuel d'exil. Un texte fort et dense, tout en finesse et en rudesse. Ecrit au cutter. Tout en ironie féroce et tendre. Velibor Čolić possède ce talent inouï de nous faire rire quand on a envie de pleurer et de nous rendre paisiblement serein quand on a des raisons d'avoir la rage au ventre.
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Librairie du Labyrinthe, ce jeudi soir d'Octobre, tu n'es pas seul à avoir comme de l'eau dans les yeux et ce n'est pas à cause de la pluie du dehors.