Cher chasseur d'instants,
Tu le sais, le plus souvent, il ne se passe rien. Rien d'extraordinaire. Rien d'exceptionnel. La scène est banale. Incroyablement banale. Un homme se roule une cigarette. Il est assis sur son scooter. Le scooter, garé près d'un mur. Entre une fenêtre et une spirale rose. C'est la spirale qui n'est pas banale. Des barreaux en fer forgé obstruent la fenêtre. Normal: c'est la fenêtre d'une chambre d'Hôtel. C'est écrit au-dessus.
Une spirale rose peinte sur le mur. Spirale nietzschéenne ou escargot en partance. Ce n'est rien. Vraiment rien. Ce n'est pas grand chose. Pas un passant que la scène n'arrête ou n'étonne.
Ce genre de séquence te fascine. Juxtaposition de signes anodins. Là est le vrai quotidien. Là se trouve la banale beauté simple du quotidien. Agencement imprévisible de signes anodins. Image vraiment extra-ordinaire. Rencontre de hasard. Choix du regard.
Ce qui ne tient pas du hasard, c'est le regard. Le choix du regard. Là est le photographe.