Cher contemplatif,
Par la force des choses, tu es devenu, bon an, mal an, depuis plus de soixante ans, un vrai citadin. Un habitant de la ville. Un homme des villes. Mais l'homme des champs n'est jamais loin. La campagne te fascine toujours autant. Une traverse départementale et tu te laisses embarquer par la couleur d'un ciel ou la texture d'un champ. Image banale pour la plupart, mais pour toi vrai tableau champêtre. Impressionniste et expressionniste. C'est toi le peintre. Toi l'artiste. Sur le motif. Sans motif.
Ton musée préféré: le musée de la nature. Entrée permanente et gratuite. Toutes les toiles sont là. A portée de main. Juste à faire le cadre. Avec les yeux. Avec le cœur. Qui n'a jamais succombé devant ces toiles nature, offertes sans façon, selon l'heure ou la saison, ne peut rien comprendre à Barbizon, rien comprendre à Monet, Manet, Sisley, Corot, Pissaro, Van Gogh and co.
Ton premier musée, tu l'as dit un jour à ta mère amusée, ce sont les champs et les bois, les chemins et ce qu'on y voit.
En ce temps-là de tes dix ans, où tu prends un plaisir immense à plonger dans les meules de foin, tu ne sais rien des Meules de Monnet. Meules moissonnées à partir de la fin de l'été 1890. La lumière comme personnage principal. Monet qui décide de peindre ses meules à différentes heures de la journée, dans la brume du matin, au lever comme au coucher du soleil. Ou sous la neige.