Cher voleur d'instants,
Tu es incorrigible. Tu as une pratique compulsive de la photographie. L'oeil toujours en alerte. En éveil. Le regard circulaire pour mieux faire entrer dans le cadre le sens du moment, la beauté de l'instant. L'insolence de l'insolite. Tu es incapable de ne pas "prendre". Tu ne sais pas te contenter de simplement voir. Regarder. Contempler. Pourquoi cette nécessité de fixer ? Ce devoir de tout fixer ? Pour laisser trace. Pour laisser des traces. Des traces du fugace. Des traces du trop fugace.
Chasseur d'inattendu, toujours aux aguets, toujours à l'affût.
Tu sais bien que ce qui est fascinant, c'est le paradoxe. Paradoxe, du grec paradoxos, παράδοξος, ce qui est contraire à l'opinion communément admise. De para, "contre" , et de doxa, "opinion". Surprenant ou choquant, au premier abord, à première vue. Ce qui va à l'encontre du sens commun. Des idées reçues. Des préjugés. C'est ce qui te plait. Ce qui t'attire.
Tu te souviens de: "Toi, tu vois des choses que les autres ne voient pas !" Une remarque qui te va droit au coeur. C'est exactement ton projet photographique. Fait plaisir parfois d'être si bien saisi.
Dans le domaine des idées aussi, tu adores cette apparente contradiction, ce raisonnement proche de l'absurde, et pourtant porteur d'une vérité désarmante. Le paradoxe, c'est ton carburant. Ton moteur. Ta potion magique. Ton remède pour pactiser avec le réel. Avec les mots ou par la photo. De bon matin et jusqu'à très tard le soir. Le monde appartient à celui qui se lève tôt, mais il se révéle aussi aux couche-tard.